Les trafiquants d’influence ou l’art de paraître proche du pouvoir, une comédie bien rodée – Par Souleymane Jules SÈNE

0
image illustrative générée par IA

image illustrative générée par IA

Dans bien des milieux professionnels sénégalais et africains de manière générale s’est installée une étrange habitude, celle de revendiquer une proximité supposée avec le grand boss . Cette posture, aussi subtile que calculée, devient pour certains un levier de pouvoir informel. À défaut d’en posséder officiellement, ils s’octroient celui d’organiser l’accès à ceux qui en détiennent.

Souvent, ce ne sont que des boys du quartier, des hommes de confiance, des amis d’enfance qui n’ont pas connu un vrai succès professionnel à qui le patron confie quelques missions personnelles. Ils sont là par proximité, par loyauté peut-être, parfois même par compassion. Le boss les garde autour de lui pour les aider, leur offrir une certaine dignité. Mais certains finissent par confondre opportunité et autorité.

Ils deviennent alors de véritables trafiquants d’influence, profitant de cette proximité apparente pour se construire une image de décideurs dans l’ombre. Il suffit d’un dîner officiel, d’un événement protocolaire, où ils n’étaient présents qu’en tant que chauffeurs ou aides logistiques, pour qu’ils s’empressent de se photographier aux côtés de personnalités influentes. Une fois les images postées, la magie opère. Aux yeux du public, ils deviennent soudain des hommes puissants, des relais du pouvoir, des gens qu’il faut connaître .

Aller dans certains directions, ministères, agences ou autres , on les reconnaît à leur manière d’occuper les couloirs, de se montrer là où il faut, quand il faut. Une photo posée aux côtés du patron, une poignée de main capturée au bon moment, et les voilà transformés en gardiens du temple. Ils s’improvisent gestionnaires d’agenda, filtrent les rendez-vous à leur guise, décident de qui peut voir qui et surtout quand. Le tout, bien souvent, à l’insu du principal intéressé.

Ce rôle auto-attribué leur confère une assurance nouvelle. Ils deviennent brusquement “importants”, parfois même arrogants. L’insolence devient un outil, la proximité une arme. Ils reçoivent des appels, traitent les sollicitations comme des faveurs personnelles, et se plaisent à faire attendre ceux qui, parfois, sont plus qualifiés qu’eux. Tout cela, pour maintenir l’illusion d’un pouvoir qu’ils n’ont pas, mais qu’ils manipulent habilement dans l’ombre.

Le plus grave, c’est que les victimes de ce théâtre ne se doutent souvent de rien. À leurs yeux, ces personnes sont intouchables, elles conduisent la voiture du patron, accompagnent ses enfants à l’école, ou escortent madame dans ses courses. Cette image soigneusement construite suffit à faire taire les doutes et à faire croire qu’ils sont des relais légitimes du pouvoir.

Mais dans le fond, ce ne sont que des illusionnistes. Le big boss lui-même, accaparé par ses responsabilités, ignore bien souvent que certains se servent de son nom pour tisser leur propre toile d’influence.

Le vrai pouvoir ne fait pas de bruit. Il ne s’affiche pas dans les couloirs, ne se prouve pas par des selfies, ni par des airs de suffisance. Il agit, il impacte, il transforme.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *